TOUT UN FROMAGE
Au cours des siècles, la fabrication de la fourme avec le lait des estives a subit des modifications techniques. Elle s’est améliorée grâce à l’utilisation de nouveaux matériels apparu vers 1890. Le presse tome et le brise caillé notamment ont remplacé le travail des genoux et des mains des buronniers. Description du processus de fabrication du fromage au buron.
Dès l’arrivée des gerles au buron débutait le long processus de fabrication du fromage grâce au savoir-faire du vacher. Pour avoir un produit irréprochable, il fallait le faire avec le lait du jour. Les fromages devaient être bienfaits, sans mauvais goût, d’une croûte unie et ferme, d’une pâte grasse et homogène.
Le lait utilisé pour la fabrication de la fourme était variable suivant les troupeaux. Sa composition exerçait on s’en doute une influence primordiale sur les rendements.
La réussite d’un bon fromage dépendait donc en grande partie de la qualité dulait employé et du travail de fabrication par le vacher du buron, c’est-à-dire le respect des manipulations des sérums et des presses qui modifiaient le rendement et la qualité du fromage Cantal.
La coupe du caillé
Le caillé, masse blanchâtre chargée d’eau, est la partie caséeuse du lait riche en matière grasse qui se sépare sous l’action de la présure. Arrivé encore tout chaud dans la salle commune du buron grâce à la rapidité du transport depuis le parc à traire, la gerle remplie de lait était déposée près du feu dans la cheminée pour éviter un refroidissement trop rapide, surtout quand la température extérieure était basse.
Le vacher, responsable de la fabrication du fromage, n’écrémait pas le lait, mais s’empressait de le cailler en versant quelques cuillérées de présure.
Au bout d’une heure le caillé ayant pris de la consistance, avec le frénial, ustensile formé d’un long manche muni d’une rondelle métallique (autrefois en bois), le caillé était brisé minutieusement. C’est pourquoi le frénial était ordinairement appelé le tranche caillé.
La séparation du caillé
L’action du vacher consistait à rassembler les brisures de caillé au centre et au fond de la gerle, par un mouvement circulaire, lent et régulier Avec la ‘planche’, tracaïre en langue d’oc, ou encore trassadou. Il s’agissait d’une simple planche de la largueur d’une main parfois percée d’une décoration en forme de cœur, présentant à sa partie inférieure un léger rebord, prolongée d’un manche. Dans le Cantal on utilisait aussi un brise-caillé emboité dans le ramasse caillé.
L’enlèvement du petit lait
Pour enlever le petit lait, on se servait du puisoir sorte d’écuelle en forme de champignon renversé,muni d’une poignée fabriqué à l’origine en bois, puis en fer-blanc et enfin en aluminium. Le puisoir était aussi appelé lou coupou ou poset. Il permettait d’arriver à ce que le caillé soit bien égoutté. Il restait donc au fond de la gerle une masse blanche, la future tome.
Quant au petit-lait, il était versé dans l’écrémeuse pour récupérer la crème qu’il contenait encore, crème qui servira à fabriquer le beurre de montagne.
Le passage à la presse à tome
Après avoir été égoutté, le caillé était vidé dans une presse à tome en bois (la catseuse) dans une toile grossière de chanvre. C’est cette opération qui a le plus évolué depuis la fin du 19ème siècle. Le vacher devait presser lentement et régulièrement le caillé pour chasser le petit lait qui restait. Le caillé prenait une forme de plus en plus compacte. On obtenait un premier fromage blanc, appelé la tome. Il fallait ensuite la laisser murir, c’est-à-dire la laisser fermenter.
Autrefois, cette opération s’effectuait avec les genoux et les mains pendant près d’une heure. L’invention de la presse à tome a simplifié le travail, libéré du temps pour le vacher et surtout amélioré la propreté en supprimant le pressage avec les genoux.
L’action de presser la tome demandait de l’attention et de la pratique. Ainsi, un bon vacher veillait, au moment de la pression, à ce que coule seulement que du petit-lait. Il retournait la tome aussitôt qu’il s’apercevait que les matières grasses (le beurre) sortait avec le petit lait
L’apparition de la presse marque une sérieuse évolution dans la fabrication du Cantal dans les burons du Cantal. Des presses en série ont été commercialisées, mais de nombreux buronniers ont inventés des presses rudimentaires en adaptant les principes de base.
Le brise tome pour l’émiettement
Instrument introduit dans le Cantal vers 1890, le brise-tome ou moulin à tome ou encore fraiseuse, était un grand entonnoir en tôle galvanisée dans lequel on mettait la tome pressée et durcie. Puis deux cylindres, munies de dents, actionnés par une manivelle la brisait, l’émiettait. Les grains de tome étaient recueillis dans un grand récipient en bois placé au- dessous.
La mise en moule
Le remplissage du moule cylindrique (une pièce par jour environ) « la forma » qui a donné son nom au fromage, s’opérait par couches successives. Le vacher pressait doucement, égalisait les morceau, salait. Le moule rempli était recouvert d’un couvercle et disposé sous le pressoir pour extraire un dernier reliquat de petit-lait.
La presse a fromage ou le pesadou
Après la presse à tome, venait celle à fromage le pésadou. La tome émietté était salée, mise dans un moule entourée d’un linge et enfin placée sous la presse à fromage. C’était en effet lors de ce travail qui requiérait de l’habileté que la tome se rassemble pour former un tout compact et prenait peu à peu, après avoir été retournée souvent, la forme de fromage.
Au bout de la première demi-heure il fallait désserer la pièce et la retourner. Après 48h, la pression avait fait son œuvre, le produit tenait et avait pris forme. Le fromage pouvait être sorti du moule et apporté à la cave ;
Dans les burons, il y avait plusieurs modèles de presse. Le système primitif appelé pésadou se composait d’un madrier chargé de gros bloc de pierre et se manoeuvrait à l’aide d’un levier. Il avait toutefois l’inconvénient de ne pas permettre de régler facilement la pression. Par la suite le système toujours en bois s’est perfectionné
Le fromage restait environ 48h sous la presse, et devait être retourné fréquemment, surtout les premières heures. A chaque fois, le vacher devait changer les linges fins qui enveloppaient la pièce de fromage par du linge sec et très propre.
Dans la cave
Le passage par la presse Dà fromage marquait la dernière étape de production d’une fourme. Après, le vacher transportait le fromage dans la cave voûté du buron ou pendant toute l’estive, il raclera, essuiera, retournera, prendra bien soin de ses pièces, des fromages dont le poids variait de 35 à 50 kilos.
Dans la cave du buron, les fromages disposés sur des planches ou des bancs grossiers se bonifiaient et formaient une croûte très épaisse qui assurait ainsi une longue conservation.
Durant la première semaine de l’affinage, le vacher devait surtout retourner les pièces tous les deux jours, sinon elles adhéreraient aux planches et s’aplatiraient, les tenir très propre, les brosser tous les deux jours avec une grosse brosse pour enlever la moisissure qui lui donnerait mauvais goût. Les fourmes non brossées risquaient à la longue de se recouvrir d’une moisissure verdâtre qui pouvait atteindre un centimètre d’épaisseur.
Un mois et demi plus tard, la fermentation s’étant opérée, la fourme pouvait être mise en vent
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